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Essai : Femme serre [Lettre 1]


Camay Vienneau

02 mai 2022



Cette semaine, j’avais envie d’écrire sur les femmes de mon entourage, les femmes fortes qui ne le savent pas encore et celle qui utilise cette force pour avancer. Après quelques évènements et une longue réflexion sur la fameuse phrase « I’m not like other girls », j’ai envie de célébrer les diverses formes que nous pouvons prendre. Je retrace mon parcours dans ce texte pour ensuite y joindre les rencontres marquantes de ce parcours.


Au secondaire, j’avais envie plus que tout que d’être le cliché de la fille « pas comme les autres ». Je refusais d’être trop féminine, trop enthousiaste, trop demandante, trop rose. Merci Wattpad, les médias sociaux et le jugement social sur mon groupe d’âge encore en développement et à la recherche d’approbation. Il m’arrive de me demander comment moi d’avant avec ma personnalité d’aujourd’hui aurait cheminé autrement.


Au Cégep, l’éveil sur les autres. Je sors d’une école enfuie en banlieue et dont la population se construit de 90 pour-cent de filles pour entrer dans un établissement scolaire avec une démographie des genres plus diversifiée et à la mentalité différente. Un clash. Le monde de la ville me charme immédiatement. Je m’ouvre enfin sur l’idée de l’importance de célébrer l’individualité de chacun. J’étudie le cinéma et je confirme que j’adore tout ce qui relève du monde de l’art. Mais dure pilule à avaler, on ne parle que peu des femmes dans le milieu. Et lorsque l’on en parle, ce n’est que très timidement. Contradictoire, puisque je me retrouve dans un milieu qui me ressemble et où je fais des rencontres marquantes, mais ce dont on me parle ne me parle pas de mes possibilités, mais de ceux des Autres. Je lis dans l’année à suivre la théorie de Simone de Beauvoir sur l’Autre. Et je réalise que pour m’y faire une place, je dois aussi célébrer ceux que je croyais être mes opposés et par conséquent mes adversaires. Un duel de boxe dans une arène rose et scintillant. Moi en bleu, les Autres en rose. Le match se termine avec ma joue bleue et mes gants scintillants. Victoire au rose, j’y tire une leçon importante.


Je prends une année sabbatique, le rêve d’un grand voyage à sac à dos à la découverte du monde. La réalité de frappe. Et plutôt que d'aller à la rencontre physique des autres, je me mets à lire un corps de travail et d’essais majeurs sur les femmes. Durant cette année, je refais la connaissance d’anciennes amies d’une nouvelle manière et je rencontre d’autres jeunes femmes qui construisent mon entourage. À leur tour, sans le savoir, elles m’aident à me redécouvrir. Durant la même année, j’ai une réalisation importante, ma famille est constituée de personnes avec leur propre réalité. Je tiens à cœur cette idée, ma sœur est ma sœur et elle est aussi une personne unique. Heureusement qu’elle est ma sœur parce qu’autrement on se serait probablement lancées dans un match de boxe verbale. Moi en jaune, elle en rouge. Les coups auraient volé haut et j’aurais perdu. L’idée m’amuse.


Durant cette année tournée à la recherche interne de qui je suis, ironiquement, je deviens plus connectée aux autres. Je lis un livre qui me marque grandement, de Virginia Woolf. Dans ce livre, elle parle d’un jardin et depuis j’imagine mon espace interne privé comme une grande cour au jardin vaste. Dans ce jardin, il y a une multitude de biodiversités qui représente chaque personne que je rencontre. Elles ont leurs propre caractère, couleur et odeur. Elles demandent des climats différents et une quantité d’attention différente. Il s’agit pour moi de nourrir ces relations différemment et par des essais et des erreurs. Mais tous ces éléments sont essentiels pour construire l’environnement dans lequel je navigue et pour me redonner de l’énergie.


À l’université, je rentre cette fois ouverte d’esprit. Toujours aussi timide, j’accepte que ça me prenne plus de temps pour approcher les autres, mais j’assume aussi que je suis opiniâtre. J’aime un bon débat, je sais ce que je veux comme futur. J’aime la beauté des arts et j’aime découvrir les jardins internes des autres. Je balance mon énergie masculine avec celle féminine, je ne les oppose pas pour renier une partie complète de qui je suis. Correction, je ne les oppose plus. Running gag avec ma meilleure amie, je suis un Chad sentimental.


Aujourd’hui, 5 ans après la fin de mon secondaire, 3 ans après la fin de mon Cégep et à la fin de ma première année universitaire, je réalise à quel point cette idée de nous diviser est ridicule. Qu’y a-t-il de mal à aimer le rose? Aimer les choses plus « féminines » ne devrait pas enlever de ma crédibilité. Avoir compris plus tôt que des faux ongles, des talons et des jupes ne m’arrête pas dans ma quête de succès, mais plutôt peuvent m’aider à démontrer ma vraie personnalité aurait été bien à savoir plus tôt. Ah! J’aurais été longue et maladroite, mais au moins j’aurais eu un peu de style avec mon vilain polo bleu obligatoire. Pourquoi aussi est-ce que j’ai cru que je pourrais mieux aider en ne disant rien? Bien plus utile de dire mon opinion et d’ouvrir une discussion. J’aurais aimé ça savoir toutes ces choses plus tôt parce que j’aurais aussi pu les dire à mes sœurs et à mon frère. On n’a pas besoin d’être qu’une seule chose et de taire des parties de nous. Au contraire, il faut donner vie à toutes celles-ci.


Mais, je n’aurais jamais pu réaliser cela sans l’aide de ceuxes qui m’entourent. Ce texte n’est que la première partie d’une suite de textes à suivre sur les prochains mois. Des textes qui se construisent sur les diverses femmes que j’ai côtoyées et qui, vraiment, m’ont appris à leur manière que l’important c’est de parler notre vérité plutôt que de nourrir un idéal homogène de qui nous devrions toutes être. Parce que, ne serait-ce pas cela le problème? Être un corps divisé, mais similaire, plutôt que d’être un corps d’alliés et diversifié. Une aurore boréale est mille fois plus belle qu’un ciel étoilé.

 
 
 

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